Le gaspillage alimentaire est un enjeu à la fois économique, écologique et sociétal. Il interroge sur notre façon de consommer, qui influe sur toutes les chaînes de production. Mais surtout, il hérisse le poil : pourquoi et comment, en temps de crise, peut-on jeter de la nourriture, qu’il s’agisse d’un produit brut ou transformé ?
Le gaspillage en chiffres : des pertes difficiles à digérer
Sur le site militant Planetoscope.com, Sur le site militant Planetoscope.com, permet de constater, en temps réel, les pertes de nourriture dans le monde. Plus de 40 000 kilos par seconde. Du côté de l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), on estime que 50% de la production alimentaire mondiale est gaspillée ou perdue. Si le chiffre seul fait froid dans le dos, ce qu’il implique est pire : il n’y a pas que le produit qui est gâché. L’eau nécessaire à l’agriculture aura été utilisée en vain, comme l’importante émission de CO2 due au fret aérien. Une fois le produit perdu, il faudra aussi traiter le déchet qu’il est devenu, une étape qui entraîne encore des frais. Ces pertes sont exponentielles : il y a quarante ans, elles étaient deux fois moins importantes. Et si rien n’est fait pour endiguer le phénomène, le gaspillage alimentaire augmenterait de 40% d’ici 2020, selon l’Union Européenne.
Plusieurs coupables, du producteur au consommateur
Qui pointer du doigt ? De vilains pécheurs qui rejettent en mer des poissons morts car ils ne correspondaient pas au calibre recherché ? D’après le parlement européen, 42% du gaspillage en Europe est dû aux particuliers. En France, l’ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie) quantifie les aliments non-consommés à une grosse vingtaine de kilos par personne et par an, dont 7 seraient jetés non-ouverts, dans leur emballage. Au total, cela représente 1,2 millions de tonnes. Mais la responsabilité du consommateur va plus loin que deux yaourts jetés pour cause de date limite de consommation dépassée. En refusant, au supermarché, de choisir une carotte moche, il impose à l’industrie alimentaire des normes sur le physique des fruits. Résultat : pour ne proposer que des fruits à l’apparence ultra-lisse, les producteurs rejettent d’office tout légume biscornu. Ils ne seront jamais mis en rayon. La grande distribution est également mise en cause. Les invendus sont jetés, même lorsqu’ils sont encore consommables. Quant aux personnes souhaitant récupérer les déchets – que ce soit par besoin ou par idéologie, auquel cas on parle de « freeganisme » –, la tâche ne leur est pas facilitée : poubelles gardées dans une zone spéciale à l’intérieur du magasin ou même arrosées d’eau de javel. Et dans la liste décidément longue des gaspilleurs, n’oublions pas la restauration qui, toujours d’après les chiffres de l’UE, est aussi responsable de 14% des pertes alimentaires.
On peut lutter chaque jour contre le gaspillage alimentaire
Première étape, consommer différemment en optant sans réserve pour « les fruits et légumes moches ». Deuxième étape, outrepasser sans vergogne certaines DLC : pour un yaourt, pas de risque dans le mois qui suit. Pour une conserve, ça se compte en mois, ou même en années. Quant aux fruits gâtés, pourquoi ne pas les recycler en compotes s’ils sont mûrs à point ? Autre idée, choisir d’offrir ou de s’offrir le bouquin bien pensé de Marabout sur le sujet (Moins gaspiller, c’est pas sorcier), ce qui sera toujours plus utile à votre cousine qu’une énième boîte de chocolats. Meilleure option encore : saluer des initiatives comme celle de Freegan Pony, le resto « freegan » qui cuisine de bons plats avec les invendus de Rungis. On peut aussi supporter et financer des projets malins comme celui des Gars Pilleurs, un collectif de Lyonnais qui depuis quelques mois, distribue gratuitement les invendus des boulangeries dans les rues de Lyon. Après quelques premières initiatives festives pour lutter contre le gaspillage alimentaire, ils souhaitent effectuer un tour de France anti gaspillage, le bien nommé Gaspi-Tour. Pour faire un don sur leur espace de crowdfunding, c’est par là.
Et le moyen le plus simple de faire avancer les choses, c’est encore d’en parler. La semaine dernière, Cyril Lignac, Ghislaine Arabian ou encore Florent Ladeyn s’engageaient, dans une lettre ouverte et dans une émission diffusée sur M6, à lutter contre le gaspillage alimentaire. Et l’été dernier, une soixantaine de députés issus de différents horizons politiques déposaient une proposition de loi pour contraindre les grandes surfaces (plus de 1000 m2) à donner les invendus alimentaires à des associations et à des banques alimentaires, sous réserve qu’ils soient encore consommables. Plein d’espoirs donc pour cette fin 2014, année européenne de lutte contre le gaspillage alimentaire.
Pour aller plus loin :
- La campagne du Ministère du développement durable contre le gaspillage alimentaire
- Le replay de l'émission de M6
- Un guide pour réduire l’empreinte du gaspillage alimentaire
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