Les Glorieuses de Bresse, véritables institutions depuis 1862, couronnent le fruit d'un an de travail pour les éleveurs de volailles de Bresse. C'est aussi un rendez-vous festif pour les habitants de la région, et l'occasion de faire des emplettes pour les fêtes de Noël. Immersion au cœur d'un concours de beauté pas comme les autres.
Nous sommes le 15 décembre et aujourd'hui, les Glorieuses de Bresse se tiennent à Montrevel-en-Bresse. Ce concours avicole récompense, depuis plus de 150 ans, les plus beaux spécimens de poulets, poulardes et chapons de Bresse, produits dans une zone bien délimitée de 100 km sur 40 km, à la croisée de l'Ain, de la Saône-et-Loire et du Jura. Le jury passera à 7h15, et il n’est que 5h du matin. Pour la cinquantaine de producteurs qui participent aux Glorieuses, c'est la dernière ligne droite. Pendant la nuit, ils s'activent pour boucler les derniers préparatifs.
Des volailles tirées à quatre épingles
Joël Billet est l'un d'entre eux. Il s'est levé à 3h du matin. Il participe aux Glorieuses de Bresse chaque année. Aujourd'hui, ce sont 60 de ses 3500 volailles de Bresse qui sont présentées à Montrevel-en-Bresse. S'il a travaillé pendant des mois pour les préparer, il sait que la concurrence sera rude : la présence de trèfles sur ses terrains est loin de lui porter chance. « La présence de carotène dans le trèfle a tendance à jaunir mes bêtes, alors que les gagnantes sont systématiquement choisies bien blanches », nous explique-t-il. « Un plumage parfaitement blanc, des pattes bleutées propres, un corps dense avec un engraissement harmonieux, une peau très fine légèrement crémée, une forme oblongue » : voilà les critères pris en compte pour les chapons et poulardes en compétition. Il a tout de même sélectionné des spécimens prometteurs. Il nous désigne un duo de chapons (on les reconnaît à leur ruban bleu) sur lequel il mise beaucoup.
Pour taper dans l'œil du jury, les producteurs bichonnent leur volaille. Chacun y va de sa technique pour la rouler le mieux possible, la peigner, la nettoyer... « Chaque volaille demande une heure de préparation », nous informe Joël. « On rase les dernières plumes avec une tondeuse à cheveux... C'est aussi précis que Miss France ! », s’amuse l’éleveur de la Ferme des Poiriers.
Mais au fait, quelle est la différence entre un poulet, une poularde et un chapon ? Le poulet a été élevé en liberté (10 m² minimum par bête... Chez Joël, c'est 15 !) pendant 9 semaines, avant de s'engraisser en "épinette", une cage en bois. Le chapon est un poulet qui a été castré (pour l'anecdote : leurs testicules sont dans le dos). La poularde est la femelle. Chapons et poulardes restent plus longtemps en épinette. Ce sont ce qu'on appelle des volailles fines, les plus prisées lors des concours avicoles (et des fêtes de Noël). Pour tous, la même alimentation : maïs de Bresse sans OGM, blé de Bresse, lait et babeurre... et l'herbe grasse Bressane, riche en insectes. Joël nous rappelle que ce sont des volailles rustiques et robustes : « une volaille industrielle ne tiendrait pas longtemps dehors avec ce climat ». Les volailles fines sont ensuite emmaillotées dans une serviette propre, une étape importante qui permet de répartir la graisse, et surtout de leur donner leur belle forme, sur laquelle elles seront jugées ce matin.
Objectif : vase de Sèvres
La bague (au nom du producteur) et l'autocollant font partie de la panoplie de la volaille de Bresse AOP. Elles certifient que le cahier des charges a bien été respecté. Le jury est sur le point d’entrer. Sur des tables toute en longueur, les volailles sont alignées, regroupées par catégorie. Toutes sont superbes, mais lesquelles seront les meilleures ? C'est aux professionnels (chefs, vétérinaires) et aux personnalités choisies d'en décider. Sophie, membre du jury, remarque chaque détail : une peau jaunie par une manipulation peu précautionneuse, une aile mal rentrée qui trahit un ficelage trop peu serré, une tache ou pire, un œil vitreux. « On voit vraiment, d'un lot à l'autre, les différences. Celle-ci n'est pas assez oblongue, on peut déjà savoir qu'elle ne sera pas retenue », tranche-t-elle devant un lot de quatre chapons. Joël a un lot de deux poulardes présélectionnées, mais il ne le sait pas encore. Il est devant la salle, en train de vendre des volailles aux visiteurs qui passent.
A l’intérieur, le chef ambassadeur de la région et triplement étoilé Georges Blanc est bien évidemment de la fête. Il n'est pas dans le jury, mais préside le Comité Interprofessionnel de la Volaille de Bresse, un produit qui est servi tous les jours dans ses restaurants. A l’issue des délibérations, le lot de chapons de Joël Billet a bien remporté un prix. Mais la plus haute distinction est sans conteste le Vase de Sèvres offert par le gouvernement. Il désigne le grand gagnant des Glorieuses, qui aura l’honneur de fournir l’Elysée pendant un an. Produit de fête et de luxe, la volaille de Bresse fait la fierté de sa région : c’est la seule volaille au monde a être distinguée par une AOP. L'excellence a un prix : les plus belles bêtes partiront à 50 euros le kilo lors des Glorieuses… Voire plus dans les boucheries parisiennes !
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